Le référendum. Les chaussonniers votent la continuation de la grève.
Fougères, 27 novembre 1906.
Les opérations du scrutin doivent commencer à midi, mais jusqu'à 1 heure le nombre des grévistes qui viennent déposer leur bulletin dans les urnes est encore restreint.



On sait, en effet, qu'une délégation de la chambre syndicale est actuellement à Rennes, où elle doit passer quelques jours à examiner les tarifs présentés par la chambre syndicale des cordonniers et à établir les conditions auxquelles les patrons syndiqués voudront rouvrir leurs usines.




1° Quel est à votre point de vue la portée du referendum d'aujourd'hui ?
2° Que pensez-vous de la délibération prise par la chambre syndicale des fabricants et publiée ce matin dans L'Ouest-Eclair ?
Voici ce que nous a répondu M. Jeusse
Le referendum d'aujourd'hui, quel qu'en soit le résultat n'a aucune portée dans le conflit actuel. Ce que nous voulons c'est discuter avec les patrons les tarifs que nous leur avons présentés.
Quant à la seconde question que vous me posez, je dois vous dire que les patrons ont perdu leur temps en allant rechercher les tarifs des autres villes. Nous sommes absolument décidées à maintenir les revendications que nous avons posées.
Le scrutin
Les opérations du scrutin ont été closes dans tous les bureaux à 5 heures, sauf cependant dans celui installé à la justice de paix où se trouvent groupées les fabriques employant le plus nombreux personnel. A un certain moment, la foule était tellement compacte qu'un service d'ordre a dû être établi, mais aucun incident ne s'est produit.
Au moment du dépouillement, plus de 2.000 personnes stationnaient aux portes de la mairie où l'on devait proclamer les résultats.
Quelques jeunes gens ont entonné l'Internationale mais ce chant est resté sans écho. Les grévistes ont voulu demeurer dignes jusqu'au bout.
A 6h. 45 la porte de la mairie s'entrouvre et M. Desrues, maire de Fougères, fait connaître les résultats.
1.017 se sont prononcés pour la rentrée aux usines aux conditions proposées par la chambre de commerce et 3.090 contre.
La proclamation de ces chiffres a été accueillie avec satisfaction par les grévistes.
En terminant, M. Desrues s'est exprimé en ces termes
Je vous invite à rentrer chez vous et à observer une attitude calme et digne comme vous l'avez fait jusqu'ici. » Beaucoup ont répandu oui! oui! soyez tranquille, et tous se sont dispersés immédiatement.